Les bois enchantés

Élancé, courbé, fin ou épais, chacun à sa place parmi les siens.

Enraciné sur sa position, il étend chacune de ses branches vers son voisin alentour.

La forêt, d’apparence immobile, observe ainsi ses visiteurs occasionnels.

Elle va ressourcer les familles venues en promenade, et encourager les sportifs dans leurs efforts.

Certains, espiègles étendront discrètement une branche vers le sentier, tentant de frôler le passant rêveur.

D’autres, plus impliqués dans les efforts physiques déployés par leurs invités du jour, vont s’unir par-delà le sentier pour créer une arche victorieuse, validant ainsi chaque point d’étapes du parcours.

Et enfin, d’autres, plus indifférents, voir même lassés, et boudant d’être toujours en première ligne, vont mouvoir leur tronc jusqu’à se vouter afin de s’écarter le plus loin possible du sentier, démontrant indéniablement, leur lassitude face à toutes ses visites intempestives et stigmatisantes.

Chaque passant laisse son empreinte. Certains par un marquage indélébile, comme la gravure d’un amour naissant, espérant ainsi, lui donner la même part d’éternité que son témoin de bois. D’autres, moins romantiques, l’amputant pour chercher simplement de quoi se chauffer l’hiver.

Mais pour celui qui sait la regarder telle qu’elle est, la forêt va lui livrer tous ses secrets.

Elle va nous dévoiler sa plus grande richesse, rendant visible l’énergie vitale qui se dégage de chaque part d’elle-même,  s’entrecroisant d’un arbre à l’autre telle une immense toile d’araignée recouvrant la forêt.

A l’approche du tronc le plus robuste, des pulsations, émanant du sol, et remontant de la plante des pieds jusqu’aux oreilles, se feront ressentir, puis entendre.

La forêt va vibrer si fortement, que des ondulations longitudinales se dévoileront aux regards éclectiques et émerveillés.

Cette cascade infinie s’élevant vers le ciel, partageant sa chaleur bienveillante à celle du monde et offrant ainsi un véritable foyer à tous ses résidants permanents. Ceux-ci, reconnaissants, lui rende à leur tour cette bienveillance, par leur minutieux travail d’assainissement des sols, et en jouant leur rôle de lanceurs d’alerte, si indispensable à la forêt.

Ils sont tous de connivence, les oiseaux nichés au sommet des arbres, sifflotant à la vue d’un promeneur en approche, et prévenant ainsi son hôtesse, de sorte que chacun puisse sonder cet intrus.

Chaque visiteur sera ainsi détecté, observé et analysé depuis son entrée dans son espace sacré jusqu’à sa sortie.

Selon le verdict rendu, l’honnête homme sera accompagné dans la bienveillance en compagnie d’écureuils guideurs, et se nourrira de son énergie intarissable. Ainsi au terme de ce fabuleux voyage, il quittera les bois revigoré mais inconscient de cette généreuse donation.

Pour le malhonnête, le parcours sera entravé par d’amusants subterfuges ; des troncs ou des branches, judicieusement positionnés pour bloquer l’accès au sentier, de petites crevasses, soigneusement dissimulées par un tapis de feuilles et de brindilles, ou encore, par le placement sournois, ici et là, de divers cailloux pour finir de mettre à terre cet envahisseur inconvenant.

Ainsi, on comprend à quel point la forêt est animée et enjouée. Créant autour d’elle une unicité sans pareil. Se servant, le plus naturellement qu’il soit, des vibrations élémentaires à l’origine de la création des mondes, pour communier avec ses congénères. Un langage, pourtant, au demeurant inaudible et imperceptible pour le plus savant d’entre nous.

Laisser un commentaire